En 1976, un groupe de lycéens madrilènes décident d’utiliser l’Ateneo Libertario de Mantuano, un ancien local phalangiste qu’ils occupent, pour développer leurs idées influencées par la littérature de science-fiction et les avant-gardes historiques de l’entre-deux guerres. Ils éditent d’abord divers fanzines avant de s’intéresser à la musique et de monter un premier groupe punk, Alex y los Drugos, puis un second, Holoplástico, davantage orienté vers le kraut rock et la vague synth pop émergente. Au duo initial formé par Servando Carballar et Arturo Lanz viennent se greffer, en 1979, plusieurs autres musiciens issus du groupe lycéen ou recrutés par petites annonces. Le groupe décide alors de se rebaptiser El Aviador Dro y sus Obreros Especializados en hommage à l’opéra futuriste italien de Francisco Balilla Pratella, L’aviatore Dro (1915).Futuristes convaincus – ce qui est par essence provocateur dans un pays n’ayant connu qu’une révolution industrielle tardive -, l’Aviateur Dro et ses ouvriers spécialisés se définissent comme des « punks scientifiques », apparaissant en combinaisons industrielles ou spatiales. Chacun de ses membres est affublé d’un pseudonyme technoïde : Arturo Lanz est Sincrotón, Servando Carballar: Biovac N, Juan Carlos Sastre: 32-32, Gabriel Riaza: Multiplexor, Andrés Noarbe: Hombre Dinamo, Manuel Guío: Placa Tumbler, Alberto Flórez Estrada: Derflex Tipo IARR.Remarqué par Xabier Moreno de la chaîne de radio récemment créée, Radio 3, le groupe enregistre à l’été 1979 une session de 6 titres ainsi qu’une première interview avant de signer, en 1980, sur le label Movieplay pour la réalisation de trois singles, dont deux seulement seront publiés dans un premier temps. Dès ses débuts, le groupe élabore un son clair et minimaliste influencé par Kraftwerk, les Residents et Devo. Les structures des morceaux, aux titres aussi évocateurs que La fille de plexiglas ou Harmonie du refuge atomique, sont volontairement simplistes et dépouillées, en un mot, mécaniques.
Synthétiseurs et voix, parfois filtrées par un vocodeur, sont mixés très en avant alors que les éléments rock’n’roll sont encore présents dans la première étape du groupe, comme la guitare surf qui parcourt Nuclear si ou le riff garage qui soutient Gestalt. Leurs paroles, pleines d’un humour polémique et acide, sont généralement des fictions racontées du point de vue de la machine, de mutants ou d’humanoïdes du futur. Nuclear si se présente ainsi comme une ode militante et décomplexée en faveur de l’énergie nucléaire, dans un pays où celle-ci est presque complètement inexistante, alors que Gestalt constitue l’ego trip robotique d’une structure métallique. Aviador Dro utilise la musique pour véhiculer ses idées avant-gardistes et anarcho-cybernétiques autour de la révolution dynamique et de la fusion homme-machine, n’hésitant pas à distribuer manifestes et pamphlets pendant les concerts ou à glisser ces derniers dans les pochettes de ses disques. Pendant les séances d’enregistrement des premiers singles, plusieurs membres du groupe se montrent en désaccord avec l’orientation trop commerciale prise, selon eux, par le son de El Aviador Dro. Lanz, Riaza, Sastre et Noarbe quittent ainsi le vaisseau fin 1980 ; les trois premiers lanceront dans la foulée la formation indus Esplendor Geométrico, l’une des plus influentes de la scène électronique expérimentale européenne des années à venir, alors que Noarbe deviendra peu à peu leur éditeur et manager. Avec l’arrivée de nouveaux membres – dont deux femmes, Marta Cervera alias Arcoiris et Maria Jesús Rodríguez alias Metalina 2 -, Servando Carballar s’affirme de plus en plus clairement comme la tête pensante d’Aviador Dro, s’efforçant de poursuivre la ligne retro-futuriste initiale de façon hyperactive. L’appartement madrilène de Cervera et Carballar, doté d’un home studio baptisé La Fábrica Magnética, devient notamment une ruche bourdonnante dans laquelle viennent enregistrer ou collaborer de nombreux groupes et musiciens amis. En 1981, Carballar et Cervera lancent l’intéressant projet parallèle, Los Iniciados, dont l’identité exacte des composantes est tenue secrète. Avec les membres d’Oviformia Sci, Aviador Dro est également à l’initiative du 1° Simposium Tecno, une soirée de concerts qui se tient le 9 mars 1981 dans la salle madrilène Marquee, et dont le but est de revendiquer la pop électronique comme composante de la Nueva Ola aux côtés de groupes comme El Humano Mecano et La Terapia Humana. En janvier 1982, alors que les nouvelles maquettes du groupe sont rejetées par les maisons de disques, Aviador Dro décide de créer sa propre compagnie discographique, baptisée Discos Radioactivos Organizados, plus connue sous son acronyme DRO. Leur première référence, l’ep Nuclear si, s’écoule en quelques mois à 5000 exemplaires et doit être repressé deux fois la même année... (La Contra Ola). Réédité par La Vida Es Un Mus en 2020... Minimal Wave monster...
J'adore ce mélange electro new wave !
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